Le jeudi matin, c’est le ministre du Budget, Bernard Cazeneuve, qui était l’invité du Medef. L’après-midi, c’était au tour du ministre de l’Economie, Pierre Moscovici. Invité à participer à la conférence « Pas de capital sans capitalisme » lors de l’Université d’été du syndicat patronal, le moins que l’on puisse dire, c’est que le ministre du budget a été harangué et bousculé par les divers intervenants. Accusé de toutes parts de vouloir ruiner l’entreprise en France, il est resté très calme et c’est d’une voix ferme, sereine et sans détours que le ministre est intervenu à la fin de la conférence. Il a d’abord commencé par une boutade en ironisant : « Je n’ai pas toujours été ministre, j’ai eu une autre vie avant. Et si j’en juge la moyenne de survie des ministres qui ont occupé mon poste actuel, je ne le resterai sans doute pas longtemps ».
Sur ce, le ministre s’est armé à défendre la politique budgétaire du gouvernement en évoquant les 14 milliards d’économies prévues pour 2014 et des mesures en faveur des entreprises. « Je suis personnellement convaincu que le rétablissement des comptes publics ne peut pas se faire par la mobilisation continue de la pression fiscale et que nous devons privilégier les économies de dépenses », a-t-il déclaré à l’issue du débat. La veille, Pierre Gattaz, le nouveau président du Medef avait tiré à boulets rouges sur le gouvernement en l’accusant de faire «le jeu du chômage en alourdissant les charges ou les contraintes sur les entreprises ».
Ministre sur champs de mines
D’ailleurs, le ton était donné puisque le débat a tourné principalement autour de la problématique de la haine du PS à l’égard du capital. Le Medef avait même invité un sociologue italien qui a discouru sur le fait que les terroristes étaient toujours « des intellectuels qui haïssaient le capital ». Une attaque frontale qui manquait de finesse et ne s’est pas épargnée son lot de lourdeur et de mépris. Le ministre ne s’est pas démonté. De sa voix calme et posée, il a poursuivi sa présentation : « Le budget qui sera présenté dans quelques semaines en conseil des ministres et au Parlement est un budget qui, pour la première fois depuis longtemps, affichera une diminution des dépenses nettes de l'Etat de 1,5 milliard et une économie globale de près de 14 milliards » d'euros de dépenses publiques.
Bernard Cazeneuve a ensuite présenté une série de mesures, annoncées ou en préparation, comme la hausse du plafond du plan d'épargne en actions (PEA) et la création d'un PEA à destination des petites et moyennes entreprises, un nouveau régime de fiscalité des plus-values mobilières « beaucoup plus incitatif pour ceux qui prennent des risques pour investir dans l'entreprise » et une « réflexion en cours sur la fiscalité de l'assurance-vie ».
Et c’est au tour de Moscovici…
L’après-midi, c’était au tour de Pierre Moscovici d’assurer sa visite aux universités d’été du Medef. Cazeneuve ayant quelque peu servi de démineur le matin même, le ministre de l’économie a sorti le jeu de la séduction pour amadouer le patronat français. Première tâche : rassurer les patrons en leur affirmant que le niveau des prélèvements obligatoires sur les entreprises n’augmenterait pas l’an prochain. Puis passant sur le front des retraites, le ministre a assuré que la hausse des cotisations patronales serait intégralement compensée dès 2014, par une baisse des cotisations pour la politique familiale.
Poursuivant son jeu de séduction, il a aussi affirmé que les prélèvements et le coût du travail baisseraient ces prochaines années grâce au CICE notamment en confirmant à la volée, la volonté du gouvernement d’axer sa politique sur la compétitivité des entreprises. Conciliation pour conciliation, Pierre Moscovici a assuré avoir donné pour consigne à l’administration fiscale d’exclure le CICE du champ du contrôle fiscal. Et pour finir en beauté, il s’est attelé à l’emploi en déclarant sur twitter à l’issue de la réunion : « Nous menons le même combat, pour le pays, pour l'emploi : l'entreprise n'est pas un problème, mais une solution » tout en expliquant qu’il souhaitait «travailler en confiance avec le Medef, pour avancer ensemble ». Soit en conclusion : un ministre envoyé le matin sur un champ de mines pour qu’un autre puisse y marcher – à peu près – à l’aise l’après midi.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Le gouvernement accusé de vouloir ruiner l’entreprise en France
la création d'un PEA à destination des petites et moyennes entreprises