« Il faut rester vigilants et mobilisés ». Fière de sa « grande victoire » pour l’exception culturelle, la ministre de la culture Aurélie Filippetti n’en restait pas moins sur ses gardes comme elle l’a fait clairement entendre alors qu’elle clôturait hier à l’Assemblée Nationale, une table ronde sur le financement du cinéma européen devant des parlementaires français et européens ainsi que des acteurs du monde du cinéma, réalisateurs, distributeurs ou exploitants. « Ce qui s'est passé au sein de la Commission européenne a révélé une volonté très claire d'affaiblir une certaine conception de la culture en Europe, d'affaiblir les mécanismes de financement du cinéma européen », a-t-elle prévenu.
« Le combat ne s'arrête pas car on est sûr qu'il y aura d'autres offensives à l'avenir, a ajouté Aurélie Filippetti. Sur un terrain plus médiatique en essayant de faire passer (culture et audiovisuel) pour des secteurs subventionnés ». Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, avait en effet violemment critiqué lundi 17 juin, la volonté de la France d'exclure le secteur audiovisuel du mandat de négociations commerciales avec les Etats-Unis. « Cela fait partie de ce programme antimondialisation que je considère comme totalement réactionnaire », a déclaré M. Barroso dans un entretien publié par l'International Herald Tribune. Un jugement à l’emporte pièce qui avait provoqué un vrai tollé.
La ministre de la culture a ensuite rappelé que le cinéma européen représentait en 2008, un volume d’affaires de 17 milliards d’euros et un million d’emploi dans l’Union Européenne. « Il est important d'expliquer que ces secteurs sont générateurs de richesse, d'emploi, de croissance (...) Il faut les préserver non pas pour faire plaisir aux créateurs mais parce que c'est bon pour l'Europe et l'économie européenne », a-t-elle insisté. La ministre a ensuite insisté sur d'autres points de désaccords actuels avec la Commission concernant par exemple, une modification des aides publiques à la création d'œuvres cinématographiques ou audiovisuelles. Ces outils « ont fait leur preuve », a encore plaidé la ministre et « Il n'y a aucune raison de remettre en cause les modalités de soutien en vigueur et qui ont permis depuis plus de 10 ans au cinéma européen de s'affirmer comme une industrie dynamique et productive ».
La ministre vise notamment le principe de territorialisation de l'aide à une œuvre, c'est à dire le conditionnement de l'aide à des dépenses effectuées dans l'Etat membre. « Les propositions avancées aujourd'hui, par la Commission européenne mettent en danger les principaux régimes d'aide (..) Revenir sur la territorialisation découragerait les autorités publiques y compris régionales à mettre en place des politiques culturelles innovantes et favoriserait le dumping social en faveur des Etats membres aux coûts de production les plus bas et au détriment de la diversité culturelle de demain », a affirmé la ministre.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Pour les Américains, l’exception culturelle à la française, c’est le retour des Gaulois (Le Monde)
Les propos du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso a proposé un vrai tollé (Le Plus Nouvel Observateur)