François Hollande veut rassurer les Français

samedi 8 novembre 2014

7, 9 millions de spectateurs ont suivi l’intervention du président de la République. A l’Elysée, on pousse des soupirs de soulagement. Selon TF1, il y aurait même eu un pic à 9,8 millions aux alentours de 20h45 soit 30 % de part d'audience. Une bonne surprise qui prouve en tous les cas que François Hollande suscite encore l’intérêt même dans un contexte d’impopularité affichée. Hier soir à mi-mandat, le chef de l’Etat a décidé de s’adresser aux Français. L’enjeu était d’être le plus honnête possible dans un contexte de perte de confiance des Français vis-à-vis de leurs politiques, de leur gouvernement et de leur président de la République. C’est d’abord dans un environnement de french bashing que François Hollande a déploré le « dénigrement » de la France par les Français eux-mêmes et a souhaité impulser de l’optimisme dans un pays qui est toujours très respecté de par le monde : « Chaque fois que je suis à l'étranger, la France – ce n'est pas moi –, la France est respectée. (…) La France est sans doute le pays au monde le plus respecté, parce que chaque fois qu'il y a une situation difficile, c'est vers la France qu'on se tourne ». 

Et pour secouer les consciences notamment dans son propre camp, le Président a agité l’épouvantail du 21 avril 2002 qui creuse encore de grandes blessures à gauche. A la question de Gilles Bouleau qui lui demandait si une telle perspective du Front National au second tour de la présidentielle, était possible, François Hollande s’est exclamé : « Oui bien sûr que c’est possible ! Comment pouvait-on prévoir dans les années 1930 ce qui allait se passer ? », avant d’ajouter dans une volonté affirmée de ne surtout pas jeter la pierre : « Les Français se tournent vers le FN parce qu'ils n'y croient plus. Je veux les convaincre qu'on ne fait rien tout seul ». Le FN, « c’est le défouloir ». Puis faisant référence aux tentations extrémistes qui se propagent en Europe, François Hollande a prévenu : « Si l'Europe ne change pas, il y a des risques de populismes ».

« J’accepte toutes les critiques »

Pourtant, le Président au plus bas dans les sondages a fait face aux critiques en affirmant : «Je savais que ce serait difficile. Je ne me plains jamais. Ce qui est dur c'est la situation de nos compatriotes. Je suis un être normal. Mais je suis le président de la République. Je ne suis pas masochiste. J'accepte toutes les critiques, j'accepte les trahisons, les reproches. Ce que je n'accepterai jamais, c'est qu'on touche à la France. Ce dénigrement. Depuis deux ans et demi, je me cramponne ». Il a ensuite défendu ses réformes en affirmant vouloir « garder le cap ».  « Mon cap c'est de faire que la France soit plus grande ». Il a ensuite glissé que chaque président de la République « faisait les réformes pour son successeur » en prenant l’exemple de l’Allemagne qui a procédé à ces réformes il y a dix ans mais a réaffirmé que s’il « ne parvenait pas à inverser la courbe du chômage », il ne serait « pas candidat » à sa succession ». 

Et force est de constater l’échec sur le chômage qu’il assume d’ailleurs, en reconnaissant avoir « pu commettre des erreurs » en pronostiquant une « inversion de la courbe du chômage » pour 2013. « J'avais parlé de l'inversion de la courbe du chômage. Ce n'est pas venu, je m'en suis fait le reproche parce que c'était une espérance pour beaucoup, notamment ceux qui étaient demandeurs d'emploi ». En septembre, le taux de chômage est reparti à la hausse : le nombre de chômeurs s'établit à 5 431 500 inscrits, toutes catégories confondues.  Puis, pour calmer le désarroi des Français face à la surenchère de taxes dont ils se sentent victimes et qui viennent encore assombrir leurs visions d’avenir, le chef de l’Etat a aussi promis qu’il n’y aurait plus d’augmentation d’impôts jusqu’à la fin de son mandat. Les seules augmentations seront celles qui ont déjà été annoncées et a aussi affirmé que la dépense de l'Etat sera plus faible en 2015 qu'en 2014

« 800 000 personnes de plus de 50 ans au chômage »

Puis changement de personne car le Président a été interviewé par quatre Français. Joëlle s’installe face au président. C’est une sexagénaire au chômage et en fin de droit. « Vous n'êtes pas seule. Il y a 800 000 personnes de plus de 50 ans au chômage », a regretté François Hollande. Une occasion de défendre les contrats de génération, l'un des projets phares de sa présidence : «  J'ai introduit le contrat de génération, pour qu'une entreprise puisse avoir un jeune et un senior ensemble. J'ai également souhaité que la formation soit mise en priorité sur les seniors. Les seniors doivent être prioritaires. J'ai demandé à ce qu'il y ait des engagements des entreprises en matière d'emplois ».  Ces contrats génération visent à favoriser l'embauche de jeunes en contrat à durée indéterminée et le maintien dans l'emploi de seniors.

Mais bien que mis en place au début du quinquennat, leur bilan est mitigé. Pour les chômeurs seniors qui ont suffisamment cotisé mais n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite, le Président a annoncé le retour d’une allocation et pour les seniors comme Joëlle à qui il manque quelques trimestres de cotisation, la création d’un contrat aidé. Ces mesures « entreront en vigueur en début d'année prochaine », a-t-il promis.

« Baisser l'impôt sur les sociétés »

La seconde personne venue interroger le président est Carine, chef d’entreprise dans le Nord de la France. Elle a interpellé le chef de l'Etat sur les cotisations sociales qui pèsent sur les entreprises et le poids de l'impôt sur les sociétés. Face à elle, le chef de l’Etat a défendu son pacte de responsabilité : « Pourquoi j'ai décidé de faire le Pacte de responsabilité et alléger le cout du travail ? On a fait ce choix, qui représente 40 milliards d'euros. Il faut aller plus loin. Qu'on puisse baisser l'impôt sur les sociétés ». Puis se défendant des comparaisons avec les pays voisins, le président a affirmé : « Il n'existe pas le Crédit d'impôt recherche en Angleterre ».  

Ce qui nous intéresse a-t-il ajouté « c'est la simplification de toutes les règles, toutes les contraintes sans que ca mette en cause les protections des salariés. On a besoin d'une négociation au niveau locale. Il y aura une modernisation du dialogue social ».  Puis François Hollande a défendu le « choc de simplification qui devrait selon les calculs du gouvernement rapporter 11 milliards d'euros, dont 60 % pour les entreprises. Il a assuré aussi qu'à partir de 2017, les baisses d'impôts du crédit d'impôt sur la compétitivité et l'emploi (CICE) seraient transformées en baisse de « cotisations sociales pérennes ».

D'un montant initial de 20 milliards d'euros, le CICE a été progressivement élargi pour se fondre dans un objectif de dégager 41 milliards d'euros pour les entreprises dans le cadre du pacte de compétitivité et de responsabilité. Hollande a ensuite affirmé que le compte pénibilité, mesure phare de la réforme des retraites honnie par le patronat prévu dans la loi de janvier 2014 sur la réforme des retraites, fera l'objet d'une mission sur sa mise en œuvre.

« On va créer 15 000 emplois d'avenir supplémentaires »

Le troisième Français intervieweur du Président est Hassen, un habitant des quartiers Nord de Marseille, bénéficiaire du RSA qui a interpelé le président sur la situation de la jeunesse. François Hollande lui a alors assuré : « On va créer 15 000 emplois d'avenir supplémentaires », d'ici janvier prochain, a dit François Hollande ; ils feront partie des 45 000 emplois aidés supplémentaires annoncés par le gouvernement ». D’ailleurs face à Yves Calvi quelques minutes plus tard, François Hollande a souligné que « Même s'il y a du chômage, c'est une chance d'avoir des jeunes  qui arrivent sur le marché de l'emploi » et a fait la comparaison avec l’Allemagne qui prévoit déjà les conséquences de sa dénatalité dans l’économie nationale.

Enfin, la dernière interlocutrice de François Hollande est Catherine, une assistante maternelle des Ardennes qui a interpellé le président sur la fermeture du collège de sa commune. Ce fut l’occasion pour François Hollande d’affirmer qu’il avait fait « de l’éducation sa priorité » et en a profité pour présenter son « grand plan numérique » pour l'école, qui prévoit notamment grâce aux nouveaux rythmes scolaires, « des cours de codage».  Comme annoncé déjà en juillet, ce plan devrait être « appliqué dans toutes ses dimensions à la rentrée 2016 » et « «Tous les élèves de 5ème seront équipés d'une tablette numérique » a-t-il précisé.

Enfin, le président  a annoncé la création d’un « service civique universel ». Contrairement au dispositif actuel qui permet  à un jeune d’effectuer une mission d’intérêt général sur une période de 6 à 12 mois, ce nouveau service civique serait plus court de deux ou trois mois et pourrait être accompli au service des autres « une maison de retraite, [pour] s'occuper de jeunes, d'une école » mais n serait pas obligatoire. Puis voulant donner aux Français de grands projets M. Hollande a conclu son intervention en annonçant que la France allait déposer sa candidature pour l'Exposition universelle de 2025 avant de glisser à l’attention d’Anne Hidalgo qu’en 2024, « ce serait bien si Paris pouvait accueillir les Jeux olympique ».

Véronique Pierron

Pour en savoir plus :

21 avril 2002 (You Tube)

Les années 1930 et l’arrivée d’Hitler au pouvoir (Hérodote)

Tentations extrémistes en Europe (Le Figaro)

Le taux de chômage est reparti à la hausse (Le Monde)

Les contrats de génération (Ministère du Travail)

Pacte de responsabilité  (Gouvernement.fr)

Emplois d'avenir (Ministère du Travail)

 

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