La décision du Conseil d’Etat sur l’affaire Vincent Lambert suspendue par la CEDH

mercredi 25 juin 2014
AP

La famille de Vincent Lambert n’en finit pas de se déchirer. Un nouvel épisode vient de se signer cette semaine après l’arrêt du Conseil d’Etat qui validait la décision des médecins et d’une partie de sa famille de cesser les soins. Dans la foulée de cette décision, les parents de ce patient tétraplégique de 38 ans en état végétatif depuis 6 ans, ont immédiatement fait un recours devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH). Celle-ci a demandé en urgence au gouvernement français  de faire suspendre l'exécution de l'arrêt du Conseil d'Etat pour la durée de la procédure devant la CEDH. « Cette mesure implique que Monsieur Vincent Lambert ne soit pas déplacé avec le but d'interrompre le maintien de son alimentation et de son hydratation », précise la CEDH dans sa requête.

Et ce, dans un climat à nouveau bouleversé en France par le débat récurrent sur l’euthanasie. Dans son arrêt, le Conseil d’Etat avait estimé mardi que la décision prise par l'équipe médicale du CHU de Reims en accord avec l'épouse de Vincent Lambert, à laquelle s'opposent ses parents, s'inscrivait dans le cadre de la loi Leonetti de 2005 qui proscrit l'acharnement thérapeutique. En fait, la loi Leonetti proscrit « l'obstination déraisonnable » et permet d'abréger la vie d'un malade via l'administration de traitements anti-douleur. Si le patient est dans l'incapacité d'exprimer ses volontés, la décision doit être prise par le médecin en concertation avec l'équipe de soins et la famille. Pourtant, des questions de délimitation de la loi se posent et Manuel Valls a chargé Jean Leonetti et le député socialiste Alain Claeys de préparer un nouveau projet de loi sur la fin de vie. Le Parlement devrait être saisi avant la fin de l'année. Mais rappelons qu’en Europe, les législations sont loin d’être harmonisées sur le sujet et si l’euthanasie est légale au Benelux et en Suisse, elle est assimilée à un homicide volontaire en Italie.

 

Un débat qui déchire

En France, le débat est sur la place  publique depuis des années et cette fois, c’est la plus haute juridiction qui s’en est emparée. Jean-Marc Sauvé, le vice-président du Conseil d’Etat a ainsi déclaré à la presse : « Au vu de tous les éléments médicaux et non médicaux, le Conseil d'Etat a jugé que le médecin en charge de Monsieur Vincent Lambert avait respecté les conditions imposées par la loi pour l'arrêt des traitements ».  « Après avoir recueilli l'avis de six autres médecins et de la famille, il a pu, sans commettre d'illégalité, et aussi douloureuse que soit cette décision, estimer que la poursuite des traitements traduisait une obstination déraisonnable », a-t-il poursuivi. Le Conseil d’Etat a ainsi pris en compte la dégradation de l’état  de Vincent Lambert qui est passé d’un état de conscience minimale à la suite d’un accident de la route en 2008, à son état végétatif actuel.

Pour fonder sa décision, en dehors de toute constatation de la perte irréversible de toute conscience, le Conseil d’Etat s’est référé à la volonté du patient. Vincent Lambert avait en effet, exprimé à plusieurs reprises son souhait de ne pas être maintenu artificiellement en vie selon certains de ses proches et notamment de sa femme. Craignant cette décision, ses parents, qui refusent de le laisser mourir, avaient par anticipation saisi la CEDH dès lundi soir, pour qu'elle ordonne à la France de surseoir à l'arrêt de son alimentation et de son hydratation, ce qu'ils ont donc obtenu. Habituellement, l’examen d’une requête devant la CEDH prend plusieurs années, mais la Cour a précisé mardi que ce dossier «serait traité en priorité».

Véronique Pierron

Pour en savoir plus:

La loi Leonetti de 2005 (Légifrance)

Un nouveau projet de loi sur la fin de vie (BFMTV)

Les législations sont loin d’être harmonisées sur le sujet et si l’euthanasie (Le Monde)

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