La France condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour insuffisance de soins

lundi 23 février 2015
AP

La Cour européenne des droits de l’homme a tranché jeudi et jugé la France coupable de traitement « inhumain ou dégradant » envers un détenu souffrant d’un handicap physique après une tentative d’évasion ratée. Elle devra lui verser 7 000 euros pour dommage moral et 4 000 euros pour frais et dépens à moins qu’elle ne conteste la décision d’ici trois mois.

Le plaignant, Mohamed Helhal, 43 ans, purge une peine de prison de 30 ans pour des faits d’assassinat, de tentative d’assassinat et de violence. En 2006, alors qu’il tente de s’évader, il fait une chute de plusieurs mètres entraînant une paraplégie des membres inférieurs et une incontinence.

Une première fois, en août 2010, il demande une suspension de peine pour raison médicale estimant qu’il ne reçoit pas le traitement nécessaire à sa condition (une séance hebdomadaire de kinésithérapie depuis 2009, rien auparavant), que les locaux ne sont pas adaptés et qu’il se retrouve dans une situation humiliante car dépendant d’un co-détenu pour les gestes de la vie quotidienne. Des médecins experts estiment que son état demeure compatible avec une incarcération, sa demande est donc rejetée à la fois par le tribunal d’application des peines de Limoges, puis en appel et en cour de cassation.

En novembre 2011, Mohamed Helhal se tourne vers la Cour européenne des droits de l’Homme en invoquant l’article 3 condamnant les traitements inhumains ou dégradants.

« Les autorités nationales n’ont pas fait tout ce qu’on pouvait exiger d’elles pour offrir à M.Helhal la rééducation dont il avait besoin. [...] L’absence ou l’insuffisance de soins et la nécessité de se faire aider d’un co-détenu pour prendre ses douches l’ont soumis à un niveau de souffrance dépassant celui qui est inhérent à une privation de liberté, » estime la Cour dans son jugement.

En revanche, elle confirme la décision des juges français de ne pas libérer le détenu, sa détention n’étant pas contraire à l’article 3.

Pour Me Patrice Spinosi, l’avocat du requérant, « cette décision marque une nouvelle avancée pour le droit des détenus. [Ce jugement] rappelle clairement que l’administration pénitentiaire n’a pas seulement des droits sur les détenus, mais a aussi des obligations à leur égard. »

Ce n’est pas la première fois que la France est condamnée dans ce genre de dossier. A trois reprises, elle a été jugée coupable pour avoir maintenu en détention des prisonniers souffrant de graves problèmes de santé.

 

Fanny Dassié

 

Pour en savoir plus :

La CEDH condamne la France (Libération)

CEDH (Slate)

 

 

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