Dans les écoles, les attentats des 7 et 8 juin contre Charlie Hebdo par les frères Kouachi et contre la superette Hyper Casher par Amedy Coulibaly qui ont fait 17 morts, ont révélé qu’ un fossé de plus en plus grand se creusait se creusait entre certains élèves et la République. Certains enseignants ont même eu la surprise de constater que chez certains élèves, le discours avait changé. Seta Kilndjian, professeur d'histoire géographie au collège Auguste Renoir à Marseille, témoigne : « Les mêmes élèves, avec qui on avait pu échanger, sont venus vers moi en me disant qu'ils n'étaient pas d'accord. Ils ont parlé de la théorie du complot, que tout cela n'avait été qu'un montage. Le dialogue s'est rompu ».
Pour remettre ses valeurs au premier plan dans les écoles, la ministre de l’éducation Najat Vallaud-Belkacem va annoncer jeudi, des mesures. Les premières pistes qu’elle a envisagées pour « faire vivre les valeurs de la République à l’école », vont tout autant dans le sens de chanter la Marseillaise, mieux former les professeurs à la pédagogie de la laïcité ou encore apprendre aux élèves à débattre. « L'école est censée développer chez les élèves un esprit critique et un esprit analytique. Or, sur des sujets simples, on n'y arrive pas », explique Fabrice Grenard, professeur d'histoire géographie au lycée Olympe de Gouges à Noisy-le-Sec. Pour ce professeur, l'enseignant ne fait plus figure d'autorité en matière d'histoire, car ce n'est plus par le cours que certains élèves s'informent.
Réduire les inégalités scolaires
Najat Vallaud-Belkacem a déjà reçu les syndicats enseignants, les représentants des parents, des élèves, des étudiants, les associations mais aussi les anciens ministres de l'Education. La ministre a précisé que « des circonstances exceptionnelles appellent des réponses nouvelles ». Parmi les axes prioritaires de la ministre, la laïcité aura bien entendu une place centrale avec « de nouveaux contenus liés à l'enseignement moral et civique » (EMC), qui entrera en vigueur à la rentrée 2015 du primaire à la terminale. Najat Vallaud-Belkacem a aussi précisé que cet EMC comportera aussi «l'enseignement laïque des faits religieux avec un effort massif de formation continue pour les enseignants, un soutien opérationnel aux équipes en difficulté ».
L’autre axe de réflexion et de travail de la ministre consiste en « la réduction des inégalités scolaires pour renforcer le sentiment d’appartenance à la République » qui « passera passera par de nouvelles mesures en faveur de la mixité et de la mobilité sociale », a précisé Najat Vallaud-Belkacem. « Nous devons mettre fin à l'écart que vivent trop d'élèves entre d'une part les principes de la République et d'autre part leur réalité quotidienne », a-t-elle ajouté. Une mesure qui sera sans doute intégrée à la nouvelle carte de l’éducation prioritaire que le ministère a révélée fin 2014 afin de rééquilibrer les budgets entre les établissements accueillant le plus d’enfants défavorisés et les autres.
Livret vert et numéro vert
Puis à la question soulevant l’intérêt ou non de chanter la Marseillaise, la ministre a répondu jeudi dernier sur RTL : « Il y a besoin pour les élèves » de « se reconnaître dans une communauté qui peut se matérialiser, pourquoi pas, par des rites. Est-ce que c'est chanter la Marseillaise », ou d'autres rites comme demander aux élèves de « se lever quand un adulte entre dans la classe...? », a défendu la ministre. Enfin, le ministère a déjà annoncé qu'un « livret de laïcité » serait distribué dans les établissements, pour aider et soutenir les équipes pédagogiques confrontées à des incidents liés à une mauvaise compréhension ou un non-respect de la laïcité. En parallèle, un numéro vert a aussi été évoqué pour venir en aide aux élèves ou aux professeurs confrontés à des problèmes de racisme ou de manquement à la laïcité. Rendez vous jeudi.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Les frères Kouachi (Les Echos)
Amedy Coulibaly (Libération)
Un fossé de plus en plus grand (BFMTV)
Les anciens ministres de l'Education (site de Najat Vallaud-Belkacem)