50%, c’est la part que le nucléaire devrait prendre dans la production d’électricité en 2025. Alors qu’aujourd’hui, elle représente encore 75%. C’était l’un des « 60 engagements pour la France » du candidat Hollande : « J’engagerai la réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % à 50 % à l’horizon 2025 ». Désormais cet objectif est inscrit dans la proposition de loi sur la transition énergétique votée mardi à l’Assemblée Nationale. Ségolène Royal très fière se félicitait d’ailleurs à Greenpeace : « C’est la première fois qu’on parle de réduction de la part du nucléaire. Il y a une évolution culturelle » et Cyrille Cormier, responsable des questions énergie à Greenpeace rebondissait en soupesant que « c’est réalisable, il y a pas mal de scénarios qui montrent comment atteindre cet objectif ».
Pourtant, le Journal Le Monde citait le 10 octobre dernier le directeur général de l’énergie et du climat au ministère de l’Ecologie qui affirmait que pour atteindre cet objectif, il faudrait arrêter « une vingtaine de réacteurs ». Et c’est aussi ce que pense la députée européenne Michèle Rivasi en ironisant « C’est de l’enfumage » car dit-elle « « On est sur un objectif de stabilité de la part du nucléaire, pas de décroissance ». Un objectif bien plus réaliste puisque les hésitations du gouvernement autour de la fermeture réclamée de la centrale de Fessenheim prouvent bien que celle de toute une flopée de sites n’est pas à l’ordre du jour car de toute évidence pour les réaliser et pouvoir planifier la transition énergétique, il faudrait déjà prévoir ces fermetures dans la loi. D’ailleurs le sénateur Michel Berson spécialiste des questions nucléaire met en exergue des « conséquences très importantes pour l’emploi et le développement économique » et reconnait que « le chiffre de 50% est très ambitieux ».
Arithmétique et politique
Ce qui prouve bien que la politique est rarement en accord avec l’arithmétique. Et en réalité, le gouvernement a décidé de plafonner la puissance du parc électronucléaire à sa capacité actuelle soit 63.2 gigawatts et Ségolène Royal affirme même que c’est « un socle à préserver ». Pourtant, l’an prochain l’ouverture de l’EPR de Flamanville est programmée et aura une capacité de 1650 mégawatts. Que fait-on alors pour préserver le socle ? On n’hésite plus et on ferme Fessenheim quitte à avoir des mouvements sociaux importants ? Le nucléaire en France, c’est un peu le serpent qui se mord la queue.
D’ailleurs, l’ex PDG d’EDF Henri Proglio, remplacé aujourd’hui par Jean-Bernard Levy – un proche du ministre de l’économie, Emmanuel Macron -, s’était montré conciliant avec le projet de la ministre de l’écologie et même satisfait : « C’est une transition énergétique qui n’oppose pas les énergies mais souligne leur complémentarité. Une transition vers un mix diversifié dans lequel le nucléaire conservera une place de choix ». Pourtant si l’on reprend quelques règles d’arithmétique, il faut compter au minimum sur 1,2 milliard d’euros pour prolonger la durée de vie - fixée à 40 ans - d’un seul réacteur nucléaire. La France en compte 58 plutôt vieillissants. Certains députés comme l'ancienne ministre EELV Cécile Duflot ont effectivement émis des doutes sur le financement de la loi qui reste flou. On peut légitimement se demander où trouver les fonds nécessaires pour favoriser une transition vers un mix énergétique…
Véronique Pierron
Pour aller plus loin :
Loi sur la transition énergétique (Le Parisien)
Fermeture réclamée de la centrale de Fessenheim (Natura Sciences)
Ouverture de l’EPR de Flamanville (Libération)