La théorie du genre ne passera pas par l’école

jeudi 30 mai 2013

« Il n'y a pas de débat sur la théorie du genre, on l'a dit à plusieurs reprises, aucun », a mis au point le ministre de l’éducation nationale Vincent Peillon, mercredi lors du « Talk Orange-Le Figaro ». Mais il a rappelé avec vigueur qu’il fallait «lutter contre toutes les discriminations, à la fois de race, religieuse, et de l'orientation sexuelle, car elles causent de la souffrance ». Le ministre n’en était pas à sa première défense contre cette tentation puisque la semaine dernière, il avait déjà exprimé sur France 2, son opposition à l'inclusion de cette théorie dans l'enseignement : « Personne n'y a jamais pensé (...). Je suis contre la théorie du genre, je suis pour l'égalité filles/garçons. Si l'idée c'est qu'il n'y a pas de différences physiologiques, biologiques entre les uns et les autres, je trouve ça absurde ».

La théorie du genre kesako ? Apparue dans les années 1970, sous  la plume de Judith Butler cette théorie du genre ou « gender » a été mise en musique dans un de ses ouvrages intitulé « Trouble dans le genre -  Pour un féminisme de la subversion ». Il n’a été traduit qu’en 2005 en français. Selon l’auteure, la distinction entre homme et femme, ainsi que l’hétérosexualité, est avant tout une construction sociale et culturelle. En somme, au delà des seules différences biologiques, il existe des interactions psychiques données par l’entourage ou la société dans le but d’assigner des rôles à chacun.

Contrairement à ce qu’affirme le ministre, cette théorie a déjà été reprise à demi-mot, dans une circulaire du 30 septembre 2010 du ministère de l'Education nationale. Selon cette dernière, le chapitre intitulé « Devenir homme ou femme », au programme pour l’année 2011-2012, doit « affirmer que si l'identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l'orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée ».

Pour l’égalité fille-garçon, pas pour la théorie du genre

Se défendant de toute tentation de dérive vers d’autres circulaires de ce type, le ministre de l’éducation s’est encore défendu : « Nous sommes pour l'égalité filles-garçons, pas pour la théorie du genre ». Les journalistes du « Talk » l’ont ensuite titillé en l’interrogeant sur un partenariat avec des associations LGBT (lesbiennes, gays, bi et trans) pour prévenir les discriminations, il a rétorqué: « Ce partenariat existe, il donne satisfaction. On a eu surtout, avec l'année difficile qu'on a vécue, beaucoup plus de souffrance chez les adolescents, de cas d'homophobie ». Puis a insisté : « C'est sept fois plus de suicides que chez les adolescents qui ont une sexualité disons moins difficile à vivre », en rappelant : « C'est notre responsabilité d'adulte, il faut veiller à protéger ces enfants d'un certain nombre de violences et de difficultés ».

Le principal syndical du primaire, le SNUipp-FSU, avait organisé mi-mai un colloque sur le thème « Eduquer contre l'homophobie dès l'école primaire ». « Comment est-il possible que l'insulte +pédé+ soit la plus fréquente des cours de récréation et que, la plupart du temps, tous les enseignant(e)s sont loin d'avoir les armes pour en parler ? », demande le syndicat. A la suite du colloque, il avait mis en ligne une « boite à outil » à destination des enseignants pour lutter contre l'homophobie. Parmi ces possibilités, sensibiliser les enfants à la diversité des familles à travers des livres comme « Jean a deux mamans », ou faire prendre conscience que les métiers sont accessibles aussi bien aux femmes qu'aux hommes à travers un « imagier renversant ».

Véronique Pierron

Pour en savoir plus :

Talk Orange-Le Figaro  de Vincent Peillon

Judith Butler : Trouble dans le genre -  Pour un féminisme de la subversion (Sciences Po)

Le SNUipp-FSU (site Syndicat)

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