Quand le droit du travail s’exerce jusqu’en prison. C’est un jugement inédit qui a été rendu par un tribunal. « Une décision révolutionnaire », pour Fabien Arakelian, l'avocat de Marilyn Moureau, détenue à la maison d'arrêt de Versailles. Vendredi, le conseil des prud’hommes de Paris a donné raison à cette femme de 36 ans, qui avait saisi la justice pour que le droit du travail s’applique aussi pour un emploi exercé en prison. Et devenir ainsi une salariée comme les autres.
Condamnée, en juillet 2010, à huit ans de prison pour « coups ayant entraîné la mort sans intention de la donner » sur son conjoint violent, Marilyn Moureau travaillait, depuis l’été de la même année, pour la société MKT Societal, en tant que téléopératrice. Mais 8 mois plus tard, lorsque l’entreprise découvre que la détenue a passé des coups de fil personnels pendant son temps de travail, elle décide de ne plus faire appel à elle. Comme en prison, il n’existe pas de contrat de travail mais un « acte d’engagement » avec l’Administration pénitentiaire, selon l’article 717-3 du code pénal, Marilyn Moureau n’a pas été licenciée mais « déclassée ».
Dans leur jugement, les prud’hommes ont donc reconnu la fin de la collaboration entre la détenue et l’entreprise comme un licenciement et Marilyn Moureau a obtenu des indemnités. Une première donc, car jusqu’ici, les prud’hommes avaient estimé, à plusieurs reprises, qu’ils n’étaient pas compétents sur les dossiers de prisonniers. « C'est un grand jour pour tous les détenus en France et j'appelle les pouvoirs publics à s'emparer très rapidement de cette question du travail en prison », a déclaré Me Fabien Arakélian. Mais si ce jugement est historique, il n’est peut-être pas définitif, l’affaire pourrait passer en appel.
Caroline Moisson