Après l’affaire Cahuzac, la transparence de la vie publique est devenue le cheval de bataille le plus symbolique – et le plus attendu - du gouvernement Ayrault. Or, depuis qu’ont été évoquées au printemps dernier les quelques mesures phares de cet ambitieux projet, leur entrée en vigueur étai attendue de pied ferme. Mardi 24 septembre, l’Assemblée nationale devrait enfin statuer sur les deux textes qui définissent et précisent les mesures destinées à encourager la transparence – et la confiance – autour de la vie publique française.
Parmi les réformes envisagées, celle relative aux déclarations de patrimoine des élus avait fait beaucoup de bruit avant l’été. Pourtant, cette mesure n’est pas en soi une nouveauté puisque depuis 1988, les parlementaires sont tenus de faire une déclaration patrimoniale et de la faire parvenir à la Commission pour la transparence financière de la vie politique. Cependant, députés et sénateurs mais aussi ministres, élus locaux et européens, chefs d’entreprises publiques, etc… seront désormais tenus de rédiger de nouvelles déclarations qui exposent les intérêts et activités de chacun. Celles-ci seront accessibles « via le mécanisme d’accès aux documents administratifs prévu par la loi CADA », souligne Regards Citoyens. La Haute Autorité de la Transparence, nouvelle entité qui verra le jour dans les prochaines semaines et qui sera pourvue de moyens afin de vérifier la déclaration des élus, permettra cet accès et « sera donc bien une administration transparente », se félicite l’association de vigilance démocratique.
Cependant, après le débat houleux sur les dérives possibles d’une trop grande publicité des patrimoines des élus, le projet de loi a finalement limité l’accès aux données portant sur le patrimoine, ce que regrette l’association Regards citoyens. Néanmoins, chaque électeur pourra, sur sa demande, consulter ces documents en préfecture. Un an de prison et 45 000 euros d'amende sont prévus en cas de publication ou divulgation des informations consultées. Si certaines limitations ont été apportées, le gouvernement défend ardemment ces obligations de transparence qui, lit-on dans le projet de loi, permettront d’éviter tout « enrichissement inexpliqué susceptible de révéler des faits passible de sanctions pénales ».
Le projet de loi sur la transparence renforce également le régime d’incompatibilité d’activités, dans le but avéré de « soustraire le mandat parlementaire des influences susceptibles de l'écarter de la prise en compte de l'intérêt général ». L’Assemblée nationale donc institué de nouvelles incompatibilités, comme celle du mandat de parlementaire avec la présidence d'une autorité administrative ou publique indépendante, ou bien avec des fonctions juridictionnelles telles que celle d'arbitre, de médiateur et de conciliateur. Une meilleure transparence mais aussi séparation des pouvoirs est, in fine, l’objectif poursuivi.
L’association de vigilance démocratique Regards citoyens s’est déclarée satisfaite de ce qu’elle considère comme une « première étape ». « Nous nous réjouissons (…) des multiples progrès apportés par ces projets de loi, notamment concernant la protection des lanceurs d’alerte et la transparence des réserves parlementaires », a t-elle affirmé, non sans quelques réserves. « La question du lobbying reste en revanche largement oubliée », regrette t-elle, puisqu’aucune mesure de transparence ne les contraint à rendre accessible le montant des dépenses de leurs actions en vue d’influer sur les décisions politiques. L’ambitieux chantier de la transparence semble donc encore loin d’être achevé.
Mathilde Leleu
Pour en savoir plus :
Transparence : quels outils pour la future Haute Autorité ? (LeMonde.fr)
Projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique (Site officiel du Sénat)