Chérif et Saïd Kouachi sont activement recherchés. Les deux frères, âgés respectivement de 32 et 34 ans, sont soupçonnés d'être les auteurs de l'attentat perpétré contre Charlie Hebdo. Les deux hommes en fuite auraient laissé derrière eux un certain nombre d'empreintes et d'indices, notamment une carte d'identité et un sac de sport ainsi qu'un chargeur de Kalachnikov. De nationalité française, les deux frères sont nés à Paris, dans le Xe arrondissement. Orphelins dès l'enfance de parents immigrés d'Algérie, les deux garçons ont passé leur enfance dans des foyers de Reims. L'aîné, Saïd Kouachi, a été arrêté et remis en liberté en 2005. Il vivait à à Reims, dans le quartier de Croix-Rouge, avec sa femme et ses enfants. Le cadet, Chérif, qui a passé son brevet d'éducateur sportif, est un djihadiste bien connu des services antiterroristes et de la justice. Il a été interpellé en 2005 alors qu'il s'apprêtait à s'envoler pour Damas avant de rejoindre l'Irak, pour y faire le jihad dans les rangs d'Al-Qaida.
Entraînement pour le jihad aux Buttes-Chaumont
Il est condamné en 2008 à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis, pour son implication dans "la filière des Buttes-Chaumont". Cette organisation aurait, entre 2003 et 2005, incité une dizaine de jeunes gens à aller combattre en Irak. A sa tête Farid Benyettou, un petit prédicateur de 23 ans qui dispense ses prêches à la mosquée Adda'Wa de la rue de Tanger, à Paris, (XIXe arrondissement) et qui se fait surnommer « L'émir ». C'est là, que Chérif et ses acolytes se sont rencontrés à partir de 2003 et ont été guidés et enseignés par Benyettou. Une dizaine de jeunes, tous issus du XIXe et qui s'apprêtait à commettre des attentats sur le sol Français ou qui ont rejoint le rang des combattants en Irak et qui sont aujourd'hui morts. Leur entraînement a consisté à quelques courses dans le parc des Buttes-Chaumont et le maniement d'une Kalachnikov apprit à partir d'une planche de croquis dans une station de métro du XIXe. Sur le point de partir rejoindre les rangs des combattants islamiques, le jeune homme de 22 ans a « la trouille », confie à l'époque son avocat commis d'office, Me Vincent Ollivier, au journal Libération.
Plus la date du départ approchait, plus Chérif Kouachi avait la trouille », ajoute-t-il. Selon lui, le livreur de pizzas à casquette a « plus le profil du fumeur de shit des cités que d'un islamiste du Takfir. Il fume, boit, ne porte pas de barbe et a une petite amie avant le mariage ». Chérif est surtout conscient de ce qui l'attend et n'est pas certain de vouloir mourir en Irak pour défendre ses frères humiliés par l'armée américaine dans les prisons d'Abou Ghraib. « Plus le départ approchait, plus je voulais revenir en arrière. Mais si je me dégonflais, je risquais de passer pour un lâche », expliquera le jeune à la barre lors de son procès en 2008, comme le rapporte le journal Le Monde de l'époque.
Tentative d'évasion
Durant les quelques mois passés en prison, le jeune homme est muré dans son silence et passe beaucoup de temps à s'entraîner physiquement. A sa sortie de prison, il est embauché à la poissonnerie du supermarché Leclerc de Conflans-Sainte-Honorine et se fait plutôt discret. Pour un temps. Deux ans plus tard, son nom refait surface. Chérif Kouachi est soupçonné de projeter la tentative d'évasion de prison de l'islamiste Smaïn Aït Ali Belkecem, ancien membre du Groupe islamique armé algérien (GIA), condamné en 2002 à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'attentat du RER Musée d'Orsay, à Paris, en octobre 1995 et qui avait fait 30 blessés. Mais faute de preuve, il bénéficie d'un non-lieu en juillet 2013. A partir de cette date, il serait en province, près de son frère à Reims. Le troisième suspect, Mourad Hamyd, âgé de 18 ans et beau-frère de Saïd Kouachi s'est présenté à la police mercredi soir. Alors que les deux principaux suspects n'ont pas encore été arrêtés, neuf personnes ont été interpellées et placées en garde à vue dans le cadre de cette affaire.
Vanessa Gondouin-Haustein
Pour en savoir plus:
Un ticket pour le jihad (Libération)
L'affaire de la filière irakienne du 19è arrondissement (Le Monde)