L’UMP boycotte le rituel des questions au gouvernement

jeudi 27 février 2014

Tout est parti mardi, d’une question du député UMP de Vendée Yannick Moreau, sur une question concernant les violences à Nantes lors de la manifestation contre l’aéroport Notre-Dame-Des-Landes où il comparait ces brutalités à celles de Kiev…. Et là, c’est le drame. Manuel Valls a saisi la question au vol comme un tennisman aguerri et sortant de ses gongs, le ténébreux ministre de l’intérieur a lancé en guise de réponse non pas à Yannick Moreau mais à Claude Goasguen : « M. Goasguen, vous en venez, vous, de l'extrême droite ».  Derrière ces civilités, une atmosphère lourde où l’opposition reprochait au gouvernement un supposé laxisme des forces de l’ordre face aux casseurs de la manifestation de Nantes. Plusieurs ténors de l’UMP avaient déjà mis en cause la responsabilité de Manuel Valls et le FN lui avait reproché sa « complaisance avec l’extrême gauche antifasciste ».  Ne se laissant pas abattre, le ministre de l’intérieur a rétorqué : « Contrairement à vous, nous ne sommes complaisants avec personne, vous, vous avez été complaisants avec ceux qui s'en prenaient aux valeurs de la République », une allusion directe aux manifestations contre la loi famille.

L’UMP se lève et sort de l’Hémicycle

C’est alors que la quasi-totalité du groupe UMP a quitté l’hémicycle à la façon un peu théâtrale des députés de la troisième République. L’un des seuls à rester fut Bernard Accoyer, l’ex-président de l’Assemblée Nationale qui a toutefois condamné des « propos inadmissibles, scandaleux ». A ce moment, le jeu de la demande d’excuses publiques a déferlé dans l’Hémicycle mais sans faire bouger d’un iota le ministre de l’intérieur qui a ignoré ces requêtes. D’ailleurs Manuel Valls a trouvé des soutiens dans sa majorité pour justifier ses dires à l’instar du chef de file des députés PS Bruno le Roux qui a expliqué à la presse que Claude Goasguen avait appartenu dans sa jeunesse étudiante à la fin des années 1960, au mouvement d'extrême droite Occident. Affirmation dont s’est défendu l’intéressé en balançant les copains : « Je n'ai jamais été membre d'Occident, contrairement à des proches comme Alain Madelin, Gérard Longuet, Patrick Devedjian, mais [j’étais] président de la Corpo d'Assas », un syndicat étudiant de droite, a rétorqué le député UMP avant d’ajouter : « Etant alors partisan de l'Algérie française, j'ai soutenu Jean-Louis Tixier-Vignancour (un candidat d'extrême droite). Mais tous ceux qui défendaient l'Algérie française n'avaient pas une démarche d'extrême droite ».

Goasguen, ancien membre du parti d’extrême droite Occident ?

Toutefois, Libération a publié aujourd’hui des documents qui tendent à démontrer le contraire ou du moins une réelle proximité. Ainsi, interrogé par le quotidien, Frédéric Charpier, auteur d’un ouvrage de référence sur le fameux mouvement (Génération Occident, Seuil 2005), affirme : « Au vu des documents et témoignages que j’ai recueillis, soit il a été membre d’Occident, soit il s’agissait d’un homonyme actif à la même époque et au même endroit que lui. Goasguen était chargé d’organiser le travail en milieu étudiant. Il a bien dirigé la corpo d’Assas, ce qui n’était nullement incompatible avec son engagement à Occident». D’ailleurs, après la défaite de la droite aux législatives anticipées de 1997, Claude Goasguen avait appelé son camp à abandonner « l'anathème » et à « sortir de l'impasse de la diabolisation du FN »….

Qu’à cela ne tienne, comme les députés UMP n’ont pas obtenu gain de cause de Manuel Valls, ils ont opté pour le boycott : « Faute d’excuses formelles, les députés UMP boycotteront la séance de questions au gouvernement de demain » donc de mercredi, a annoncé mardi,  leur chef de file Christian Jacob, dans un communiqué, dénonçant des « insultes inacceptables » et une « perte de sang-froid » du ministre de l'Intérieur. Il n’y eut qu’un précédent depuis l’instauration de ce rituel parlementaire des questions au gouvernement en 1974 : les députés PS avaient boycotté plusieurs séances d'affilée en 2009 pour exiger des garanties sur leurs droits d'expression, dans le cadre d'une réforme du règlement de l'Assemblée menée à l'époque.

Véronique Pierron

Pour en savoir plus:

Manifestation contre l’aéroport Notre-Dame-Des-Landes (Le Parisien)

La proximité de Goasguen avec Occident (Libération)

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