« En décidant d'un non-lieu, la justice vient de me déclarer innocent dans le dossier Bettencourt », écrivait hier, l’ancien chef de l’Etat sur sa page Facebook. Nicolas Sarkozy vient d’être complètement libéré de cette affaire alors qu’il était mis en examen depuis mars pour abus de faiblesse. Ce sont les juges Jean-Michel Gentil, Cécile Ramonatxo et Valérie Noël qui l’avaient soupçonné d’avoir profité de la faiblesse psychique de Liliane Bettencourt aux fins d’obtenir des fonds pour lancer sa campagne électorale de 2007. Dans leur ordonnance de 267 pages, les juges affirment que l'ex-président « avait connaissance de l'état de vulnérabilité particulièrement apparent de Mme Bettencourt » et qu'il est bien allé « deux fois » au domicile des milliardaires, dont la seconde pour « obtenir un soutien financier » de l'héritière de l'Oréal. Or, les juges n’ont pas réussi à établir un lien direct entre « un comportement abusif de Nicolas Sarkozy » envers Liliane Bettencourt et le retrait le 26 avril 2007, de 400 000€ en liquide des comptes Bettencourt en Suisse. Cette remontée avait été opérée par Patrice de Maistre, l’ancien homme de confiance des milliardaires, qui avait rapatrié des fonds de la même manière après la première visite supposée de l’ex chef de l’Etat du 24 février.
Le cocorico de Sarko
« Deux ans et demi d’enquête. Trois juges. Des dizaines de policiers. 22 heures d’interrogatoires et de confrontations. Quatre perquisitions. Des centaines d’articles mettant en cause ma probité durant la campagne présidentielle. C’était donc le prix à payer pour que la vérité soit enfin établie », écrit encore Nicolas Sarkozy sur sa page Facebook. Puis, il remercie ceux qui l’ont soutenu et « les Français dont la fidélité envers et contre tout m’a bouleversé ». Viennent ensuite quelques règlements de compte : « Aux responsables politiques qui durant ces longs mois ont utilisé cette « affaire » et participé à cultiver le soupçon, je veux rappeler combien la présomption d’innocence est un principe fondamental ». Puis il ajoute : « On ne gagne jamais à calomnier. On ne fait qu’abaisser la démocratie ». Pourtant… la route n’est pas close pour l’ancien chef de l’Etat dont le nom est encore cité dans plusieurs affaires.
La bonne fortune de Nicolas Sarkozy n’a pas profité à l’ex-ministre du budget puis du travail Eric Woerth. Ce dernier n’échappe pas au renvoi devant le tribunal pour « recel » sans autre précision. Eric Woerth aurait perçu des fonds pour la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, de la part de Patrice de Maistre. Un renvoi qui va toutefois à l’encontre de la requête du Parquet d’un non-lieu pour l’ex ministre du budget.
Vers des procès dès 2014
Quant aux autres personnes renvoyées en même temps que M. Woerth devant le tribunal, figurent l’avocat Pascal Wilhem, un autre gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt et l’homme d’affaire Stéphane Courbit. L’accusation ? Le premier a fait souscrire à la milliardaire un investissement de 143 millions d’euros dans la holding du second. Dans la classe des renvoyés devant le tribunal se trouvent aussi deux anciens notaires de l'héritière de l'Oréal, le gestionnaire de son île seychelloise et son dernier infirmier. Et bien entendu François- Marie Banier, l’ex ami de la milliardaire, qui a été le déclencheur de toute cette affaire.
Si le parquet ne fait pas appel, plusieurs procès auront lieu. Celui du majordome de Mme Bettencourt qui avait réalisé des enregistrements dans son salon, et cinq journalistes qui les ont publiés, seront jugés pour atteinte à la vie privée. MM de Maistre et Woerth auront aussi à répondre de trafic d'influence. Enfin la juge du tribunal de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, devra rendre des comptes pour violation du secret professionnel.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Le dossier Bettencourt (Le Monde)
Nicolas Sarkozy cité dans plusieurs affaires (Le Monde)
L'avocat Pascal Wilhem et l’homme d’affaire Stéphane Courbit (Libération)