Aix-en-Provence recevait dimanche tout le gratin de la scène économique et financière européenne. L’objectif était de trouver un nouveau souffle à une Europe enlisée dans de multiples crises qui n’en finissent pas de l’affaiblir. Pierre Moscovici a plaidé pour que le commissaire européen aux affaires économiques et monétaire devienne aussi « ministre des finances » de la zone euro et que celle-ci soit dotée d’un budget propre. Ce que réclame le ministre de l’économie en substance, c’est plus de démocratie et cette réforme de la gouvernance a pour but d’endiguer « le populisme » et les discours anti-européens qui assombrissent la démocratie du Vieux Continent. Sur le ton de l’humour détourné, le ministre de l’économie a raconté : « Je suis toujours sidéré des nuits qu'on passe sur des virgules par rapport à des décisions qu'on aurait pu ou dû préparer » avant d’ajouter « Et pourtant, l'Europe a réussi à traiter la crise financière, il lui reste maintenant à résoudre la question essentielle qui lui est posée: le grand défi de la croissance ».
Un constat de déficit de légitimité démocratique de l’Europe à un an des élections européennes et du renouvellement de la commission de Bruxelles. « Nous avons donc renforcé de facto considérablement l'union politique (mais) il n'y a pas l'équivalent en légitimité démocratique », a regretté l’ancien président de la Banque Centrale Européenne, Jean Claude Trichet. Dans la foulée, il a appelé à donner plus de capacité d’influence et de décision au Parlement européen ». Mais jean Claude Trichet a tout de même insisté sur le bilan positif de l’Europe en soulignant que pendant la crise « nous avons réussi à faire d'immenses pas en avant », à travers « des décisions prises par 17 démocraties » grâce au « renforcement du pacte de stabilité », la surveillance macro-économique et l'Union bancaire.
Annuler la dette souveraine ? Un exercice extraordinairement dangereux
Au-delà des velléités de démocratie de l’Europe, le point fort des rencontres se sont bien entendu focalisées sur la nécessité pour les Européens de poursuivre leurs efforts de redressement au regard de l'ampleur des dettes souveraines des pays riches qui ne sont pas près d'être remboursées. La directrice du fonds monétaire européen, Christine Lagarde, a à nouveau tiré la sonnette d’alarme : « On a un taux moyen aujourd'hui de 110 %" du PIB de dette publique dans les économies avancées. C'est du jamais vu depuis les années 1880 ». Elle a ensuite concédé que ces dettes s’étaient « considérablement alourdies à l'occasion des différents plans de relance » en 2009, mais qu’elles ne pouvaient pas « pour autant pas être effacées », a-t-elle aussi prévenu.
« On ne peut pas imaginer un instant que toutes les économies avancées se retrouvent en Club de Paris dans une perspective de restructuration des dettes globales », s’est offusquée Christine Lagarde avant de préconiser « des politiques budgétaires responsables, crédibles et de long terme » pour « placer l'endettement sur une trajectoire descendante ». Une position partagée par le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer qui avait jugé la veille « extraordinairement dangereuse » une annulation totale de dette souveraine.
Pierrre Moscovici s’est enfin efforcé de calmer les esprits avec un zeste de diplomatie en jugeant qu’on était « en train de changer de paradigme » car l’Europe commençait à revenir à une attitude plus pragmatique en privilégiant les mesures structurelles pour relancer l'activité plutôt qu'un respect sacro-saint du retour des déficits sous le plafond des 3 % de PIB.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Les discours anti-européens (France télévisions)
L’Europe a réussi à traiter la crise financière (Toute l'Europe)
Le pacte de stabilité (Vie publique)