Nucléaire iranien : La France prête à travailler avec le nouveau président modéré mais attend des gestes concrets

samedi 10 août 2013
AP

Dès juin, rappelant que « les attentes de la communauté internationale à l’égard de l’Iran sont fortes », Laurent Fabius s’était dit prêt à travailler avec le nouveau président. L’élection, le 14 juin, d’Hassan Rohani, présenté comme un « modéré », notamment par le chercheur de l’Iris, Thierry Coville, aux promesses de changements, d’ouverture - mais qui n’en est pas moins un pur produit du système - prônant « un dialogue sur un pied d’égalité, le respect mutuel, la confiance bilatérale et l’abandon des hostilités » et dont la lourde tâche est de relever une économie fragilisée par les sanctions internationales, semble de nature à relancer les négociations.

La France souhaite « voir l’entrée en fonction du président Rohani ouvrir une nouvelle étape dans les relations avec l’Iran. »

Après l’investiture du nouveau président iranien ce week-end, la France a réaffirmé sa volonté de dialogue avec Hassan Rohani. Le 6 août, Laurent Fabius a reçu l’ambassadeur d’Iran en France, Ali Ahani, et lui a exprimé « le souhait de la France de voir l’entrée en fonction du président Rohani ouvrir une nouvelle étape dans les relations avec l’Iran. »

« Relevant l’affirmation d’une volonté de dialogue de la part du président Rohani », le ministre des Affaires étrangères a souligné : « La France, comme ses partenaires, se tient prête à travailler avec les nouvelles autorités, mais elle attend désormais de l’Iran des actes concrets en réponse aux préoccupations internationales sur la finalité de son programme nucléaire, son engagement en Syrie et la situation des droits de l’homme. »

Hassan Rohani, partisan du dialogue, n’entend pas voir les droits de l’Iran déniés

Lors de sa première conférence de presse, le 6 août, le « Cheikh diplomate » - qui a déjà eu à connaître les négociations sur le dossier du nucléaire dans les années 2000 - s’est dit « déterminé » à régler ce conflit et « prêt » à des « négociations sérieuses et substantielles » « sans perte de temps » avec le groupe 5+1 – il s’agit des Etats-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de la Russie, de la Chine et de l’Allemagne.

Cependant il a également rappelé que l'enrichissement d'uranium était un « droit indéniable » de l'Iran et a précisé : « Le programme nucléaire est une question nationale. Le gouvernement insiste sur les droits nucléaires conformes aux règles internationales. Nous ne céderons pas sur les droits de notre Nation mais nous sommes partisans de dialogue et d'entente. » Selon Hassan Rohani, les interlocuteurs de la République islamique doivent comprendre qu'une solution n'est possible « que par la négociation, et non par la menace. »

Des messages de « bonne volonté » de la part des Occidentaux

Si les Occidentaux ne se sont pas bousculés à la cérémonie d’investiture d’Hassan Rohani, les messages encourageants se sont multipliés. Washington – qui vient pourtant d’adopter de nouvelles sanctions à l’encontre de l’Iran - s’est dit prêt à un « partenariat de bonne volonté ». Catherine Ashton, chef de la diplomatie européenne, a écrit au nouveau président une lettre dans la quelle elle assure se tenir prête – avec les 5+1 - « à continuer les pourparlers pour trouver une solution aussi rapidement que possible » et espérer « que nous allons pouvoir programmer des discussions significatives avec votre équipe de négociateurs ». Quant à Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères russe, il s’est dit d’accord avec Hassan Rohani sur la nécessité de régler le différend par la négociation et considère qu’« un nouveau cycle doit, étant données les circonstances, se tenir avant la mi-septembre. On ne peut le différer plus longtemps. »

La France, ainsi que ses partenaires, attend des « gestes concrets »

Le 7 août, la France, prudente, persiste et signe, elle attend plus que des déclarations d’intentions : « C’est à l’Iran de montrer son sérieux en apportant des réponses précises aux propositions formulées à Almaty et en faisant des gestes concrets de nature à répondre aux préoccupations internationales sur son programme nucléaire. » « Si l’Iran y est effectivement prêt, la France, avec ses partenaires du groupe E3+3, est disposée elle aussi à reprendre les discussions. »

À l’instar des Américains, les Français et les Allemands restent prudents et réclament des gages de bonne volonté, des « gestes concrets ». Il semblerait que la nomination aux Affaires étrangères de l’ancien ambassadeur à l’ONU du gouvernement Khatami, Mohammad Javad Zarif, ayant des liens avec des politiques américains, notamment le vice-président Joe Biden, en soit un premier. Et Hassan Rohani s’est dit confiant quant au fait de lever rapidement les inquiétudes.

Dans ces échanges d’amabilités percent donc les points d’achoppement et si la relance des pourparlers avec un « modéré », un « président de l’ouverture » est une bonne nouvelle, ils s’annoncent ardus avec les fins négociateurs que sont les Iraniens. Selon Bernard Hourcade, chercheur au CNRS spécialisé sur l’Iran cité par RFI, il est possible que le nouveau président fasse avancer le dossier, car, Ali Khamenei ayant le dernier mot, « il a la confiance du Guide suprême et il a les moyens de faire quelque chose ». Ces négociations doivent donc avant tout être voulues par les Occidentaux, selon le chercheur.

Anne-Laure Chanteloup

Pour en savoir plus :

"Avec Rohani, il va y avoir des changements en Iran" (par Mathilde Munos, France Info)

Hassan Rohani, un président d'ouverture pour l'Iran ? (par Aabla Jounaïdi, RFI)

Les Etats-Unis prêts à un "partenariat de bonne volonté" avec l'Iran de Rohani (RFI)

Nucléaire iranien : le président Rohani se dit prêt à des négociations "sérieuses" (France 24)

Iran - Nucléaire (Extrait du point presse du 26 avril 2013) (ministère des Affaires étrangères)

Point presse du 7 août 2013 (ministère des Affaires étrangères)

Biographie de Laurent Fabius (AllGov France)

 

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