« Gérer les enseignants autrement ». Le titre du rapport de la Cour des comptes, rendu public mercredi, annonce déjà la critique. Et au fil des pages, le constat restera sévère. Et la conclusion des Sages de la rue Cambon n’en sera pas moins cinglante : « Le problème n’est pas celui du nombre d’enseignants ou d’une insuffisance de moyens (…). C’est l’utilisation des moyens existants qui pose problème : la gestion des enseignants se caractérise en effet depuis de nombreuses années par de multiples dysfonctionnements. »
Un rapport dont se serait bien passé le gouvernement, à l’heure où le ministre de l’Éducation nationale a annoncé une loi sur la refondation de l’école - actuellement débattue au Parlement -, avec notamment la création de 60 000 postes d’enseignants sur 5 ans. Une promesse de campagne de François Hollande sur laquelle ne manque pas de revenir la Cour des comptes, qui s’en prend aussi à l’ancien gouvernement. « La réduction du nombre d’enseignants au cours de la révision générale des politiques publiques, comme son augmentation programmée sur cinq ans, sont vaines si elles se font à règles de gestion inchangées », écrit ainsi l’institution.
C’est « une réforme d’ensemble » que préconise la Cour des comptes. Car il est urgent de renverser la tendance : arrêter la dégradation des résultats des élèves et mettre en valeur le métier de prof. Et pour cela, il faut déjà dans un premier temps « redéfinir le métier enseignant en adaptant en particulier les obligations réglementaires de service ». Pour les Sages de la rue Cambon, il existe un « décalage » entre la réalité du métier et le statut. À l’heure actuelle, « la seule obligation » des enseignants est d’assurer leurs heures de cours devant les élèves, occultant ainsi leurs autres missions comme le travail en équipe ou encore l’aide au travail personnel des élèves.
Pointées du doigt aussi les « règles d’affectation et de mutation ». « Les postes d’enseignants sont répartis sur le territoire selon des critères qui ne caractérisent que partiellement et indirectement les difficultés des élèves », selon la Cour des comptes. Qui ne manque pas non plus de souligner la faible rémunération des enseignants, « inférieure de 35% à celle d'un cadre non enseignant de la fonction publique ».
Vincent Peillon n’a pas manqué de réagir à ce rapport. Et le ministre de l’Éducation nationale a reconnu, au Sénat devant la presse, qu’« il y a beaucoup de choses positives sur lesquelles nous pouvons prendre acte ». « Malgré certains désaccords », a-t-il précisé. Car s’il s’accorde avec les Sages sur le fait que « la grande richesse de ce ministère, ce sont les enseignants », il ne comprend pas les critiques sur les 60 000 créations de postes. « Nous avons besoin de ces embauches pour assurer la continuité du service public », a-t-il expliqué. Des discussions sur la refondation du métier d’enseignant devraient être ouvertes avant la fin de l’année.
Caroline Moisson
Pour en savoir plus :
Gérer les enseignants autrement (rapport de la Cour des comptes)