Il est toujours très attendu. « Il » c’est le rapport annuel de la Cour des Comptes. Et cette année encore la cour des Sages ne déçoit pas sa réputation sulfureuse et intransigeante de gardienne en chef des comptes de la République. A chacun son tour. En 2013, c’est EDF et la SNCF qui sont dans la lorgnette du gendarme. La première est épinglée pour les salaires et avantages jugés trop généreux de ses salariés et sans lien avec la performance de l’entreprise. Les comptes de l’entreprise ont été passés au microscope pour la période 2005-2011. Les magistrats de la vénérable cour estiment que : « Les salariés du groupe EDF, contrairement aux salariés du secteur privé, n'ont pas subi de ralentissement du rythme de progression de leur rémunération globale depuis 2008, en dépit des résultats contrastés d'EDF ». Appuyant là où ça fait mal, ils rappellent ensuite les performances moyennes ou carrément mauvaises de certains paramètres financiers du groupe comme le chiffre d’affaires, l’endettement ou la valeur de l’action.
Les salaires des dirigeants passés au crible sont aussi pointés du doigt car jugés « en forte augmentation jusque récemment, de même que les « nombreux avantages liés à l’emploi » pour les salariés du groupe comme les tarifs avantageux ou les abonnements gratuits. C’est ainsi que la vénérable assemblée conseille de placer la barre un peu plus haute pour les augmentations de salaire et de revenir sur certains tarifs préférentiels d’électricité pour les agents. La facture d'électricité de l'agent EDF oscille, en effet, en moyenne entre 5 et 10 % de celle du consommateur particulier et quelque 300 000 personnes en bénéficient, à la fois les actifs et les retraités.
Le groupe fait valoir dans ses réponses que « la plupart » de ces avantages « ne sont pas si éloignés de ce qui se pratique ailleurs, dans d'autres entreprises françaises », et que l'augmentation des rémunérations des dirigeants a été nécessaire pour préserver les ressources humaines dans un contexte de concurrence. Mais la Cour ne baisse pas sa garde et pointe ensuite « l'évolution du modèle de la distribution d'électricité », en évoquant notamment « l'existence d'un fort besoin d'investissement », et critiquant la « coordination insuffisante » des investissements des collectivités territoriales.
Le budget « com » de la SNCF sous les sunlights
Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, le gendarme des comptes publics, accroche ensuite à son tableau de chasse, le budget communication de la SNCF. Pour viser plus juste encore, elle s’empare d’un fait réel. En septembre 2011, les 600 cadres de la boite avec en maître de cérémonie Guillaume Pépy, s’en sont allé pour un séminaire de travail de 4 jours à Tanger au Maroc. Les sages ont fait leurs comptes et ont chiffré cette petite vadrouille à 2,7 millions d’euros. Soit 1430 euros par personne et par jour sans compter… l’iPad 2 offert à chaque manager opérationnel. Mais l’enquête ne s’arrête pas sur ce fâcheux évènement et les magistrats retiennent d’autres opérations. Ils s’étonnent ainsi qu’en janvier 2009, la cérémonie des vœux aurait couté 660 000 euros. Un coût cérémoniel qui a été crescendo avec les années. A juger : « en janvier 2010 : 891 585 euros et 668 700 euros en 2011... ». Et tout ceci sans « le moindre respect des règles élémentaires de la procédure d’achat », vilipende la Cour des Comptes.
Pressentant l’orage de la cour des sages, la SNCF avait anticipé et annoncé en décembre 2012 la publication prochaine d'un rapport sur la gestion du budget communication depuis les années 2000. Dans les Echos, Patrick Ropert, le directeur de la communication du groupe depuis 2010 a confirmé, le 24 décembre dernier, qu' « Il a pu y avoir de la négligence sur les process, mais ces négligences ont été en partie corrigées. Les contrats qui devaient être mis en compétition l'ont été en 2012. Le rapport de la Cour nous permet d'aller plus loin dans la professionnalisation de la communication du groupe ». On en saura plus le 13 février, jour de publication de ce rapport….
Véronique Pierron