En rendant public mardi son rapport de 170 pages sur « les politiques en faveur du marché du travail », la Cour des comptes a tout simplement mis les deux pieds dans le plat. Chaque année, ce sont 50 milliards d’euros qui sont dépensés pour l’indemnisation du chômage, les aides à l’insertion ou à la réinsertion et la formation professionnelle des chômeurs. Une somme importante pour des résultats au final « décevants », jugent les Sages de la rue Cambon. Qui ne manquent pas non plus de s’inquiéter sur le futur, de plus en plus incertain, de l’assurance chômage. Car d’un endettement de 9 milliards d’euros en 2010, il est passé à 13,7 milliards d’euros fin 2012 et pourrait s’élever à 18,5 milliards d’euros cette année, estime la Cour des Comptes.
Et les magistrats financiers n’y vont pas par quatre chemins pour dénoncer des politiques de l’emploi qui s’essoufflent. Face à la montée continue du chômage depuis 18 mois. « Inadaptées », « obsolètes »… En clair, pour les magistrats financiers, le marché du travail a évolué. Mais pas les politiques de l’emploi, qui sont restées sur leurs acquis, ou plutôt sur leurs faiblesses pourtant loin d’être méconnues. Comme les contrats aidés et leurs « résultats médiocres », l’effort de formation des chômeurs « particulièrement insuffisant », la « faible mobilisation du chômage partiel », pas de « véritable coordination » entre les différents acteurs des politiques de l’emploi… Et quid du régime d’indemnisation du chômage ? Qui s’il est « plus protecteur que dans beaucoup d’autres pays », il est aussi plus généreux.
Alors les Sages de la rue Cambon appellent à une vraie réforme. Et pour cela, ils formulent 26 recommandations qui ne manqueront pas de faire grincer quelques dents. Concernant l’assurance chômage, la Cour préconise de « réviser l’ensemble des paramètres », et propose notamment de tailler dans l’indemnisation chômage des cadres jugée trop élevée ou encore de « rendre plus coûteuses les contributions des employeurs ayant le plus recours aux contrats courts ». Les efforts doivent aussi se concentrer sur « les demandeurs d’emploi et les salariés qui sont les plus fragilisés par la crise », avec entre autres « la fusion » des différents dispositifs de chômage partiel mais aussi un meilleur « ciblage » des formations professionnelles.
Au lendemain de la publication de ce rapport, Michel Sapin a reconnu sur RTL qu' « il faudra prendre des mesures » pour réduire le déficit de l’assurance chômage. « Je le dis sans détour. Mais en même temps, qu'un système d'indemnisation chômage soit déficitaire dans une période de gros chômage, c'est la nature des choses », a poursuivi le ministre du Travail. « Les partenaires sociaux, seuls gestionnaires du dispositif (…), vont devoir (…) d'ici à la fin de l'année, mener des négociations pour trouver des solutions qui permettent de revenir à un déficit raisonnable en période de chômage. »
Caroline Moisson