vPlus question de légiférer sur les salaires des patrons du privé. Pierre Moscovici l'a annoncé dans une interview accordée au journal Les Echos daté de vendredi. C'est l'une des promesses de François Hollande qui vient donc d'être abandonnée. « Il n'y aura pas de projet de loi spécifique sur la gouvernance des entreprises », a déclaré le ministre de l'Économie. Bien loin donc de ce qu'il avait dit en juillet dernier. « Une loi régulera, voire prohibera certaines pratiques qui nous semblent excessives et donnera davantage de place aux représentants des salariés dans les instances qui fixent les rémunérations », promettait-il alors. Contraire aussi à ce qu'avait annoncé en mars Jean-Marc Ayrault. « Nous avons veillé à protéger le pouvoir d'achat des classes populaires, plafonné les rémunérations des dirigeants des entreprises publiques. Dans quelques semaines, Mesdames et Messieurs les Députés, je vous proposerai un projet de loi pour que ces mesures s'appliquent aussi aux dirigeants des grandes entreprises privées », avait déclaré devant l’Assemblée nationale le Premier ministre.
Changement de cap donc : désormais, Pierre Moscovici prône le dialogue et compte sur une « autorégulation exigeante ». Comme il le dit dans l’entretien, le ministre de l’Économie a rencontré il y a quelques jours la présidente du Medef, Laurence Parisot, et le président de l’Association française des entreprises privées (Afep), Pierre Pringuet, « qui se sont engagés à présenter rapidement un renforcement ambitieux de leur code de gouvernance ». « Ils m’ont assuré qu’ils étaient prêts à des avancées importantes, notamment en recommandant le « Say on Pay », qui permettra à l’assemblée des actionnaires de se prononcer sur la rémunération des dirigeants. Notre but est d’éviter de figer des règles dans la loi, quand celles-ci sont amenées à évoluer sans cesse dans un environnement international mouvant. » Toutefois, le ministre met en garde : « Si les décisions annoncées ne sont pas à la hauteur, nous nous réservons la possibilité de légiférer. »
Un revirement qui passe mal à gauche. « Ce n’est pas une reculade, mais à l’évidence, on n’est pas au niveau que nous nous étions nous-mêmes fixés », a tempéré le député socialiste Jean-Christophe Cambadélis sur i>Télé. « La réalité de la crise est complexe, c’est très, très difficile aujourd’hui de faire passer ce type de loi dans un moment où nous avons besoin de tous pour avancer. » En revanche, cette annonce a été saluée par l’UMP. « C'est bien qu'il renonce à limiter les salaires du patron et que ça se fasse dans un cadre du conseil d'administration ça me convient plutôt mieux », a estimé le chef de file des députés UMP Christian Jacob sur RTL. « C'était de la démagogie cette promesse électorale, un mensonge de plus », a dit le député UMP Henri Guaino sur Canal+.
Caroline Moisson
Pour en savoir plus :
Pierre Moscovici : « Pas de loi sur la rémunération des patrons » (par Elsa Conesa, Étienne Lefebvre et Elsa Freyssenet, Les Echos)
Jean-Christophe Cambadélis invité du face à face politique de Christophe Barbier (i>Télé)