« J’ai été pris dans une spirale du mensonge et m’y suis fourvoyé ». Durant quatre mois, et même jusque devant les députés, Jérôme Cahuzac a toujours réfuté les affirmations de Mediapart, qui l’accusait d’avoir possédé un compte à l’étranger afin de dissimuler des revenus au fisc. Du moins jusqu’à aujourd’hui, mardi après-midi, où il a finalement avoué. Après une entrevue d’1h30 avec les juges d’instruction chargés de l’enquête sur ses comptes présumés en Suisse et à Singapour, l’ancien ministre du Budget a été mis en examen pour « blanchiment de fraude fiscale ».
Dans une note postée sur son blog, l’ex-homme fort de Bercy, qui a démissionné le mois dernier, a reconnu avoir un compte bancaire à l’étranger « depuis une vingtaine d’années ». « J’ai rencontré les deux juges aujourd’hui. Je leur ai confirmé l’existence de ce compte et je les ai informés de ce que j’avais d’ores et déjà donné les instructions nécessaires pour que l’intégralité des actifs déposés sur ce compte, qui n’a pas été abondé depuis une douzaine d’années, soit environ 600.000 €, soient rapatriés sur mon compte bancaire à Paris. »
Jérôme Cahuzac se dit « dévasté par le remords ». Toujours dans cette note, il demande « pardon » au président, au Premier ministre, au gouvernement mais aussi aux Français pour cette « faute inqualifiable ». Avant de conclure : « J’affronterai désormais cette réalité en toute transparence. »
En réaction à ses aveux, un communiqué de l’Élysée, bref mais sans appel, dans lequel « le président de la République prend acte avec grande sévérité des aveux de Jérôme Cahuzac ». « En niant l’existence de ce compte devant les plus hautes autorités du pays ainsi que devant la représentation nationale, il a commis une impardonnable faute morale. Pour un responsable politique, deux vertus s’imposent : l’exemplarité et la vérité. » Quant au Premier ministre, sa position est également sans ambigüité. « Je lui demande de tirer toutes les conséquences de ce mensonge particulièrement grave et de ne plus exercer de responsabilités politiques », a déclaré Jean-Marc Ayrault mardi soir sur France 2.
Dans l’opposition, on s’interroge : que savaient François Hollande et Jean-Marc Ayrault ? Dans un communiqué, le patron de l’UMP estime que « ce mensonge signe définitivement la fin de la gauche morale et donneuse de leçons ». Pour Jean-François Copé, le président doit « s’en expliquer lui-même devant les Français ». La gauche aussi accuse le choc. Les socialistes s’estiment « trahis », selon le porte-parole du parti, David Assouline.
Caroline Moisson