Le changement c’est maintenant. Un certain François Hollande en avait fait son arme de campagne électorale. Aujourd’hui, le Sénat se prépare aux grands changements. Certains parleront, sarcastiques, de grand ménage. Si lors de sa réélection à la tête de l’institution, Gérard Larcher a dépêché deux groupes de travail pour travailler sur la gouvernance du Sénat et sur ses méthodes de travail, un documentaire très critique sur le train de vie des sénateurs diffusé sur France 3 le mercredi 28 janvier a forcé le Sénat a brusquer le déroulement des mesures. Même si rien n’est encore calé, les grands sujets sont connus et concernent l’absentéisme, l’utilisation de l’IRFM (indemnité représentative de frais de mandat,), de 6 037 euros net par mois et par sénateur, la réserve parlementaire, l’organisation du travail ou encore le financement des groupes politiques. Le président du Sénat devrait annoncer ces mesures le 11 mars prochain mais déjà devant la presse la semaine dernière, il avait prévenu que les mesures à venir « ne peuvent pas être que des mesures cosmétiques ».
Lutter contre l’absentéisme
Et parmi les mesures travaillées par les groupes de travail, la première prend la forme de sanctions financières pour lutter contre l’absentéisme des sénateurs. Ainsi, à l’instar de ce qui se fait à l’Assemblée nationale en commission, les sénateurs ne pourraient avoir droit qu’à deux absences, la troisième donnera lieu à une déduction financière. Une autre idée de sanction consiste aussi à moduler la réserve parlementaire en fonction de la présence. Toutefois, des voix s’élèvent prétextant que la réserve est un moyen d’action pour les autres et non pour soi. De même, une seule possibilité de procuration serait désormais possible lors des votes des textes phares et notamment lors des votes solennels. La disposition a déjà été utilisée une première fois lors du vote sur la loi NOTRe (Nouvelle organisation territoriale de la République). L’effet a été immédiat : l’hémicycle était beaucoup plus rempli qu’habituellement. Si tous les textes ne seront pas concernés, Gérard Larcher a annoncé que d’autres projets de loi phares seront votés selon ce principe, comme le texte sur la transition énergétique.
L’IRFM sur la sellette
L’IRFM est un brulot au Sénat et l’un des axes de réflexion consiste à proposer une meilleure utilisation de cette indemnité. En effet, elle n’est pas soumise à l’impôt sur le revenu et les sénateurs n’ont pas de compte à rendre quant à son utilisation et dans ces conditions, les portes sont ouvertes aux dérives comme celles dénoncées la semaine dernière par l’association Pour une démocratie directe mais coté Assemblée Nationale. Certains députés auraient en effet acheté leur permanence électorale avec leur IRFM. Mais le sujet est complexe alors au Sénat, un consensus semble se dessiner plutôt autour d’un guide de bonnes pratiques et de déontologie pour établir ce que les sénateurs peuvent payer avec l’IRFM et ce qu’ils ne peuvent pas payer. Certains sénateurs comme la présidente du groupe CRC, Eliane Assassi va plus loin et propose de réduire l’IRFM.
Financement des groupes politiques et réserve parlementaire
L’affaire de détournement de fond présumé qui concerne le groupe UMP avec la fameuse URS (Union républicain du Sénat) a laissé des traces au Sénat. Cette URS avait permis ainsi aux anciens membres du groupe Républicains et indépendants de toucher de l’argent en complément. Et aujourd’hui le Sénat réfléchit sur le contrôle inexistant de cet argent public qui sert à financer des activités politiques et des campagnes électorales. De même, la réserve parlementaire qui permet de financer des projets communaux ou des associations selon le choix des parlementaires s’élevait à 54 millions d’euros pour le Sénat en 2013 contre 90 millions à l’Assemblée Nationale. Chaque groupe parlementaire reçoit entre 130 000 et 150 000 euros par sénateur. Et là, la transparence devrait être totale car « Ce sera publié. Chacun saura qui a donné à qui et pourquoi », explique la sénatrice socialiste Françoise Cartron. Cependant… La publication de la Réserve parlementaire existe déjà dans le cadre du projet de loi sur la transparence. L’Assemblée s’y était pliée en janvier 2014. Par contre, le Sénat a tardé. Le ministère des Finances a finalement publié le détail de la réserve parlementaire des sénateurs en septembre dernier.
Un travail législatif réorganisé
Enfin, le travail législatif devrait être réorganisé car c’est aussi une manière de lutter contre l’absentéisme. « On va réorganiser le travail dans l’agenda. Les commissions se réuniront le mercredi matin quand il n’y a pas séance, et les missions d’information ou commission d’enquête devraient se réunir le jeudi matin. Il faut faire en sorte qu’il n’y ait pas d’alibi pour ne pas être là », explique Françoise Cartron. Mais le grand absent de ces travaux reste le salaire des fonctionnaires qui n’est pas évoqué et qui avaient été pointés d doigt par le documentaire de France 3.
Véronique Pierron
Pour en savoir plus :
Le changement c’est maintenant (Vidéo You Tube)
Documentaire critique sur le train de vie des sénateurs (L'Express)
La loi NOTRe (Legifrance)
Pour une démocratie directe (site officiel)
L’affaire de détournement de fond (Le Parisien)