Dans la famille PS, on demande Michel Rocard. Décidemment, l’alarmiste Rocard n’en finit pas de s’agiter depuis la nouvelle présidence socialiste. Il vient d’ailleurs de publier avec l'économiste socialiste Pierre Larrouturou un livre intitulé « La gauche n'a plus droit à l'erreur ». Tout un programme. Comme celui qu’il vient de lancer et qui prend le contrepied du gouvernement en prêchant une réduction du temps de travail et un retour à la retraite à 65 ans.
Pour l’ancien chef du gouvernement (1988-1991) « Il faut travailler plus, tous collectivement, pour gagner plus collectivement », a-t-il martelé dans un entretien dans le JDD. « Il y a le feu » s’exclame-t-il et poursuit non moins alarmiste : « Regardez où en sont les moteurs de la croissance. La consommation est en panne à cause du chômage, l'investissement aussi puisque les perspectives sont nulles, les exportations sont en berne car l'Europe est en récession et la dépense publique est contrainte par l'objectif de réduire les déficits ». Il jette alors un pavé dans la marre et lance un sujet qu’il qualifie lui-même de « tabou » : la réduction du temps de travail.
« Aussi longtemps que nous n'aurons pas fait accepter à nos partenaires européens un ralentissement dans la réduction de la dette, nous serons sous contrainte », assure l’ancien premier ministre. « La première des urgences, c'est de faire baisser le chômage. Comme nous n'avons pas de croissance économique, la seule façon d'y parvenir est de réduire le temps de travail », soutient-il. Il sermonne alors pour « que la réflexion s'ouvre à nouveau ».
Allonger la durée de cotisation
Michel Rocard argumente en avançant qu’ « En France, les salariés travaillent en moyenne 36,5 heures par semaine, contre moins de 33 heures en Allemagne et moins de 31 aux Etats-Unis. Il faut y parvenir par la négociation, en réduisant les cotisations sociales des entreprises ». Selon lui, un tel changement de paradigme « permettra de réduire un peu la durée de chacun. Si les partenaires sociaux s'en saisissent, Hollande n'ira pas contre », assure Michel Rocard et glisse dans la foulée qu’il est « dangereux et mauvais » de geler les retraites complémentaires car « L'amputation du pouvoir d'achat est imbécile, alors que le pays a besoin de davantage de consommation ».
Selon l’ancien premier ministre, « la seule solution est d'allonger la durée de cotisation, d'aller peut-être jusqu'à 43 annuités ». Voilà qui va en faire hurler plus d’un de Bastille à Nation. Mais Rocard ne se démonte pas et affirme que la France est « le seul pays développé qui a fixé un âge de droit de départ à la retraite » en saupoudrant le tout d’un brin de politique politicienne : « La réforme Sarkozy, poursuit-il, a fait passer au forcing les 62 ans ... C'est décoratif, cet âge n'est pas une limite physique, ni intellectuelle ». Il martèle encore : « Il faut dire la vérité aux Français, le vrai calcul se fonde sur la durée de cotisations, pas sur un droit lié à un âge borné et inutile », dit encore Michel Rocard pour qui « en conséquence on peut aller jusqu'à 65 ans ». Le gouvernement va sans doute apprécier ces propositions…
Véronique Pierron